Jeûner pour se retrouver

"Le

Ils lui dirent : "Les disciples de Jean jeûnent souvent et font des prières, de même ceux des Pharisiens, tandis que les tiens mangent et boivent." Jésus leur dit :"Est-ce que vous pouvez faire jeûner les invités à la noce pendant que l’époux est avec eux ? Mais des jours viendront où l’époux leur aura été enlevé, alors ils jeûneront en ces jours-là."

Luc 5.33-35.

L’époux nous a-t-il été enlevé pour que nous jeûnions ?… Même s’il est avec nous, nous ne pouvons pas prétendre être parfaits. Force est de reconnaître que nous sommes encore dans la chair et nous sommes toujours sujet à une certaine pesanteur. Nous risquerions d’être comme le pharisien dans la parabole de Jésus (Luc 18:9-14), si nous croyions être plus justes que les autres. Le reproche adressé à l’Eglise de Laodicée résonne encore plus fort dans ce cas : "Parce que tu dis : je suis riche, je me suis enrichi, je n’ai besoin de rien, et que tu ne sais pas que tu es misérable, pitoyable, pauvre, aveugle et nu" (Apocalypse 3.17). C’est ici que nous avons besoin de nous retirer un peu.

Le jeûne est, en fait, un moyen de prendre distance par rapport à nous-mêmes pour bien voir ce que nous sommes, pour voir en quel état nous nous trouvons. Quand nous avons tout (à manger, vêtements, logement, etc.), nous voyons la vie en rose, nous croyons être quelqu’un. L’expérience montre pourtant que quand l’homme a tellement faim, il ne peut rien, même faire quelques pas pour aller de l’avant. Il prend conscience de sa misère en ce moment, tout comme l’auteur de l’Apocalypse dit : "misérable, pitoyable, pauvre, aveugle et nu". Jeûner signifie dans ce cas, nous dépouiller de ce qui nous semble essentiel – le repas, pour percevoir ce qui est encore plus essentiel.

Ayant faim, nous nous reconnaissons petits et misérables. La première réaction due à notre instinct animal est de trouver à manger. Ne pouvant rien faire, étant faibles, nous demandons de l’aide à ceux qui peuvent nous donner à manger. D’abord, le jeûne nous rappelle notre petitesse, notre nullité, puis il nous apprend à devenir humbles. Il ne s’agit pas que de l’humilité devant les hommes, mais surtout de l’humilité devant Dieu. Et c’est la chose plus essentielle : reconnaître sa dépendance de Dieu. Le fruit recherché dans le jeûne n’est autre que "cette reconnaissance de notre néant devant Dieu et de notre dépendance continuelle vis-à-vis de Dieu dans notre existence et notre activité.". C’est la pauvreté en esprit, la première béatitude proclamée par Jésus en Matthieu 5.3.

Jeûner, c’est aussi se mettre à la place de ceux qui n’ont rien à manger, c’est faire l’expérience dans notre propre corps de ce dont souffrent nos pauvres frères et sœurs. Ils sont nos semblables (Esaïe 58.7). Le jeûne nous pousse ainsi à aller vers les autres. Bref, redécouvrir nous-mêmes chez les autres. La descente de notre Seigneur Jésus-Christ sur terre est ainsi le jeûne par excellence. Se dépouillant de sa nature divine, il a expérimenté dans son corps la condition humaine. Ayant connu la souffrance humaine, il a de la compassion pour les hommes et peut faire beaucoup pour eux.